Décret sur la fin de vie | CBSP : Coordination Bretonne de soins Palliatifs

Décret sur la fin de vie

PARUTION DES DÉCRETS D'APPLICATION DE LA LOI DU 2 FÉVRIER 2016 SUR LA FIN DE VIE

Mercredi 31 Août 2016

 

 Trois textes réglementaires (deux décrets et un arrêté ministériel en date du 3 août 2016) venant préciser la loi du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie (voir ici) sont parus le 5 août au Journal d'Officiel.

L'un des décrets concerne les "procédures collégiales et le recours à la sédation profonde et continue prévue par la loi du 2 février 2016" ; l'autre décret ainsi que l'arrêté sont "relatifs aux directives anticipées" dont on rappelle qu'elles sont prévues par anticipation dans le cas où une personne serait dans l'incapacité de s'exprimer sur sa volonté des suites de sa maladie ou d'un accident grave (voir également, en ce qui concerne les directives anticipées, l'article L 1111-11 du Code la Santé Publique).

 

L'arrêté ministériel édicté propose un modèle de directives anticipées qui diffère en certains points (soit par des précisions soit par des simplifications) de celui qui avait été proposé par la Haute Autorité de Santé en avril 2016 (voir notre précédent article : ici) dont il faut donc retenir surtout les guides qui ont été élaborés pour aider les professionnels à accompagner les personnes dans l'écriture de leurs directives anticipées.

 

L'arrêté comprend 8 parties ("annexes") :

 

  • Un texte introductif présentant le dispositif des directives anticipées sous l'angle de questions (elles traitent par exemple des objectifs des directives anticipées : "pour quoi les écrire?", des modèles proposés, de la communication des directives anticipées au médecin et à la "personne de confiance" désignée, de leur modification et de leur conservation...)
  • Une fiche à renseigner concernant l'identité de la personne qui rédige ses directives anticipées
  • Un paragraphe concernant "les informations ou les souhaits que [la personne] veu[t] exprimer en dehors de [ses] directives anticipées"
  • Un premier modèle de directives anticipées ("modèle A") pour les personnes atteintes d'une "maladie grave" et "proches de la fin de leur vie"
  • Un modèle de directives anticipées pour les personnes "en bonne santé", qui ne sont pas atteintes d'une maladie grave ("modèle B")
  • Une note prenant en compte le cas particulier dans lequel la personne est dans l'impossibilité d'écrire seule ses directives anticipées (deux "témoins" doivent soussigner que les directives anticipées consignées représentent bien "l'expression de la volonté libre et éclairée" de la personne concernée
  • Un formulaire permettant d'indiquer qui est sa "personne de confiance" (la signature des deux "parties" est requise)
  • Un formulaire de modification ou d'annulation des directives anticipées précédemment rédigées par la personne (ou son représentant, en présence de deux témoins)

 

Pour consulter le texte de l'arrêté et télécharger les modèles de directives anticipées : cliquez ici

 

Concernant le décret relatif aux directives anticipées (consultable ici), voici ses apports :

  • Modification de l'article R 1111-17 du Code la Santé Publique : il précise désormais que "les directives anticipées s'entendent d'un document écrit, daté et signé par leur auteur, majeur, dûment identifié par l'indication de ses noms, prénoms, date et lieu de naissance" (cf fiche proposée dans l'arrêté décrit plus haut) et rappelle, ainsi que le précisait déjà l'article L 1111-11 du Code de la Santé Publique issu de la loi du 2 février 2016, que "la personne majeure sous tutelle peut rédiger des directives anticipées, avec l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué". L'article R 1111-17 ajoute par ailleurs, en conséquence de la possibilité de réviser ses directives anticipées, qu'"en présence de plusieurs écrits répondant aux conditions de validité, le document le plus récent l'emporte". Le cas particulier énoncé dans l'arrêté ministériel (impossibilité d'écrire et représentation sous le sceau de deux témoins) est repris également ici.

 

  • Modification de l'article R 1111-18 du Code de la Santé Publique : l'article nouveau résume les informations qu'il est nécessaire de préciser dans les directives anticipées, conditionnant leur validité (il reprend les dispositions de l'arrêté ministériel détaillées point par point ci-dessus) et notamment les trois paragraphes structurant les modèles de directives anticipées : la volonté ou le refus de la personne qu'on le maintienne artificiellement en vie (avec des exemples de situations dans lesquelles cette question peut se poser, selon que la personne est en bonne santé ou atteinte d'une maladie grave au moment de la rédaction de ses directives anticipées) ; la volonté ou le refus de mise en oeuvre d'actes ou traitements médicaux (le texte rappelant en préambule le principe de non-obstination déraisonnable) ; la volonté ou le refus, en cas d'arrêt des traitements de maintien en vie, de mise en oeuvre d'une sédation profonde et continue jusqu'au décès, associée à un traitement de la douleur.
  • Modification de l'article R 1111-19 du Code de la Santé Publique : il concerne les questions d'accessibilité (dont il rappelle l'importance, notamment pour le médecin qui sera amené à prendre une décision), de transmission et de conservation des directives anticipées. Au titre de la détention/conservation, sont mentionnées les possiblités suivantes : dossier médical partagé, registre national informatisé des directives anticipées (lire notre article ici), dossier patient du médecin (traitant ou non) prenant en charge le patient / dossier médical hospitalier si le patient est hospitalisé / dossier de soins en établissement médico-social, le patient, la personne de confiance, un membre de la famille ou un proche. "Dans ce cas, leur existence, leur lieu de conservation et l'indentification de la personne qui en est détentrice, peuvent être mentionnés, sur indication de leur auteur, dans le dossier médical", précise le texte. Il est également indiqué que "tout établissement sanitaire ou médico-social interroge chaque personne qu'il prend en charge sur l'existence de directives anticipées".

 

  • Modification de l'article R 1111-20 du Code de la Santé Publique : il est ainsi écrit : "Lorsqu'il envisage de prendre une décision de limitation ou d'arrêt de traitement en application de l'article L 1111-4 [...], le médecin recherche l'existence et le lieu de conservation des directives anticipées" du patient.

 

Le décret modifie également les titres IV et V du Code de la Santé Publique. Il créé par ailleurs un chapitre I de ce même code (droits des personnes malades / "Information des usagers du système de santé et expression de leur volonté") et l'article R 1541-1 (dispositions applicables en Nouvelle Calédonie et en Polynésie française).

 

 

 

Concernant le décret modifiant le Code de Déontologie Médicale et relatif aux procédures collégiales et au recours à la sédation profonde et continue prévue par la loi du 2 février 2016 (consultable ici), il créé également le chapitre I du Code de Santé Publique et l'article R 4441-1 de ce même code. Il créé en outre plusieurs articles dont l'article R 4127-37-1.

 

  • Article R 4127-37-1 : y est précisée la procédure collégiale à mettre en oeuvre lorsque les directives anticipées du patient apparaissent au médecin qui le prend en charge "manifestement inappropriées ou non-conforme à la situation médicale" (rappelons que la loi oblige le médecin a respecter les volontés exprimées par le patient dans ses directives anticipées, hors deux situations dont celle-ci) : le refus dans ce cas de les appliquer ne peut être décidé par le médecin qu'après "avoir recueilli l'avis des membres présents de l'équipe de soins, si elle existe, et celui d'au moins un médecin, appelé en qualité de consultant, avec lequel il n'existe aucun lien de nature hiérarchique". Par ailleurs, "il peut recueillir auprès de la personne de confiance, ou à défaut de la famille ou de l'un des proches, le témoignage de la volonté exprimée par le patient". Les témoignages et avis recueillis ainsi que les motifs de la décision de refus d'appliquer les directives anticipées doivent être inscrits au dossier médical du patient, indique l'article R 4127-37-1.

 

  • Article R 4127-37-2 : y est précisée la procédure collégiale à mettre en oeuvre lorsque le médecin souhaite limiter ou arrêter un traitement au titre du refus d'une obstination déraisonnable pour un patient hors d'état d'exprimer sa volonté et n'ayant pas rédigé de directives anticipées : la décision de limitation ou d'arrêt des traitements ne peut dans ce cas être prise qu'après avoir mis en oeuvre une procédure collégiale similaire à celle mentionnée à l'article précédent (cf ci-dessus) à la différence près que dans ce cas, l'avis motivé d'un deuxième consultant peut être recueilli si le médecin en charge du patient et/ou le premier médecin a qui il a été demandé avis l'estime(nt) utile. A la différence de la décision de refus d'appliquer les directives anticipées, la décision de limitation ou d'arrêt des traitements pour une personne n'ayant pas rédigé de directives anticipés ne peut-être prise également qu'après avoir recueilli auprès de la personne de confiance, ou à défaut de la famille ou de l'un des proches, le témoignage de la volonté exprimée par le patient (cela était seulement une possibilité dans le cadre de l'article R 4127-37-1). L'avis des titulaires de l'autorité parentale dans le cas d'un mineur et du tuteur dans le cas d'un majeur protégé est requis. Le texte précise par ailleurs que le médecin est tenu d'engager une procédure collégiale en cas de demande de la personne de confiance ou à défaut, de la famille ou l'un des proches. L'ensemble doit être consigné dans le dossier médical du patient et la personne de confiance, ou à défaut la famille ou l'un des proches, informés.
  • Article R 4127-37-3 : y est indiqué qu'une procédure collégiale (identique à celle indiquée ci-dessus concernant l'article R 4127-37-2) est requise avant la mise en oeuvre par le médecin d'une sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience jusqu'au décès, associée à une analgésie. Cela est valable que ce soit des suites d'une décision d'arrêt des traitements de maintien en vie prise pour un patient hors d'état d'exprimer sa volonté et n'ayant pas rédigé de directives anticipées (cf point ci-dessus) ou bien suite à la demande d'un patient d'en bénéficier (dans les deux cas énoncés par la loi et dans la mesure où le médecin décide d'accéder à cette demande. L'éventuel refus par le médecin de mettre en oeuvre la sédation à la demande du patient doit être motivé et consigné dans le dossier du patient et celui-ci en être informé). A noter par ailleurs que même en l'absence de directives anticipées, le témoignage de la volonté exprimée par le patient doit toujours être recherché. Dans le cas d'un patient hors d'état d'exprimer sa volonté mais ayant rédigé des directives anticipées (dans lesquelles un refus de sédation ou au contraire la volonté de mise en oeuvre d'une sédation sans préalable collégial peut s'exprimer), celles-ci prévalent (hors les deux cas d'exception cités plus haut) ; elles doivent donc être consultées par le médecin avant toute décision. Comme pour les autres situations, la décision, ses motifs et l'ensemble de la procédure y ayant conduit doivent être motivés et consignés dans le dossier médical du patient et la personne de confiance ou à défaut la famille ou l'un des proches en être informés.

 

  • Article R 4127-37-4 : il souligne le devoir d'accompagnement du patient mais aussi des proches, ainsi que la nécessité de les informer.

 

 

Le décret modifie par ailleurs les articles R 4127-36 (obligation de recherche du consentement de la personne soignée, de respect de son refus des investigations ou traitements après l'en avoir préalablement informé des conséquences, d'information de la personne de confiance, de la famille ou d'un proche avant toute intervention pour une personne hors d'état d'exprimer sa volonté) et R 4127-37 (principes de soulagement des souffrances et de non-obstination déraisonnable).

Information

La Coordination Bretonne de Soins Palliatifs (CBSP) a pour missions de promouvoir, améliorer, fédérer et coordonner la pratique des soins palliatifs par les acteurs médicaux et paramédicaux de Bretagne.